Le vin rouge de la Chine rouge
Après le fromage, le Vin !
Je suis redescendu directement du Qinghai au Shandong, de 5000 mètres jusqu'au niveau de la mer.
Dans
cette péninsule verdoyante se trouve une grande partie la production
chinoise de vin de qualité , avec de nombreux terroirs.
La campagne ressemble à l'Europe, les gens sont sympas, ca sent bon la guarigue...
Un oenologue français, ancien directeur des vins de Rotschild, est installé depuis neuf ans en Chine. C'est Gérard Colin, l'homme est un personnage haut en couleurs.
Ce passioné avait a déjà lancé le premier bon vin chinois, Grace Vineyard dans le lointain Shaanxi. "Les paysans ici ont le sens des petits travaux, ils connaissent très bien la vigne. Tout ce qui manque, c'est une technique". Il a découvert dans le Shandong, près de la ville balnéaire de Penglai, "un terroir d'exception, qui va produire un grand vin chinois". Comprenant trois villages et des vignes, ce terroir sera financé par des grands noms du vin international. "Les vins du Nouveau monde n'existent pas" dit Gérard Colin, "car les vignes viennent toutes d'Europe à l'origine. Il n'y a que des terroirs du Nouveau monde. Et la Chine sera l'un des meilleurs, j'en suis certain". Il n'est pas pressé, prévoyant la première bouteille en... 2012 !
Plus près de Pékin, dans le Hebei, une cave expérimentale a été créée. Sur une petite surface, une vingtaine de cépages sont plantés. Tous les pieds de vignes ont été apportés par avion de France ! et aussi les cuves et le matériel. La production réduite est très bonne, mais pas commercialisée. Bizarre ? Non. Après un repas (bien arrosé ?) il y a quelques années, Jacques Chirac et Hu Jintao en personne ont décidé "faisons du vin ensemble !". Le président français a proposé d'offrir des techniques de vinification françaises, pour promouvoir l'image de la boisson nationale en Chine. Dans un bâtiment ultra-moderne, avec les meilleures installations. Résultat, après des millions d'euros français dépensés et du bon vin produit, cela reste un projet de prestige. Des cours y sont donnés aux oenolgues chinois, et d'ailleurs l'un d'entre-eux m'a appris à déguster le vin !
(en français, avec fort accent chinois): "Bonne attaque, tlès long en bouche, pas tlo des tanin, un peu de fluit, letour agléable"
Ce pro est payé 300 euros par mois, alors qu'il gagnerait dix fois plus en France ou dans un grand hôtel... mais il est salarié d'Etat, et surtout, il adore son métier !
(ce producteur de bon vin du Shandong a créé le "vin macéré à l'oignon". C'est immonde, mais ça marche)
Il y a une vingtaine d'années, le gouvernement chinois a pris la décision de planter de la vigne massivement à travers tout le pays. Pour aider les agriculteurs des régions où la terre est sablonneuse. Et d'autre part, la production de vin est censée réduire celle d'alcools de céréales. Ce n'est pas une précaution de santé. "Nous avons besoin des céréales pour la nourriture. Aujourd'hui une trop grande quantité part en alcool, alors que les hommes et le bétail ont besoin de ces céréales", explique un critique gastronomique proche des autorités. En voyant les ravages à Pékin de l'Ergoutou (alcool de riz violent), on ne peut qu'encourager les efforts vinicoles des autorités... Le problème, c'est qu'une infrastructure énorme a été mise en place avant qu'il y ait des débouchés. On ne boit simplement presque pas de vin de raisin en Chine ! Donc une bonne partie est convertie en brandy de troisième classe... Autre problème, la qualité. Les grandes marques publiques chinoises (Great Wall, Dynasty... 3/4 des ventes) achètent leur raisin en vrac d'un peu partout, même du raisin de table, il est fermenté à un endroit, embouteillé dans un autre... aucune tracabilité.
Pub shangaienne pour du vin chinois. Amour et Paris !
Aujourd'hui la consommation de vin augmente en Chine, et la boisson rentre dans les moeurs citadines. On en parle comme d'un alcool "bon pour la santé", un argument qui a du poids ici. Mais le vin reste un produit de luxe, offert aux mariages, bu dans les restaurants chics et entre intellectuels, yuppies ou nouveaux riches. Il ya dans les grandes villes des clubs de dégustation, des sociétés d'amateurs. Les supermarchés proposent des longs étals de vin, presque tous de la même marque d'Etat chinoise. Il y a aussi des bouteilles de vin rouge chinois de base dans presque toutes les petites épiceries de quartier, chose qui m'aurait paru incroyable lors de mon premier séjour en 1993, quand il fallait aller au "Magasin de l'amitié" pour voir autre chose que de l'alcool de riz vendu à la louche au litre, ou de la bière à goût variable.